Source : information.tv5monde.com par Pascal HérardLa récente annonce de Wikileaks d'un financement participatif pour récompenser de 100 000 € celui ou celle qui dévoilerait les accords du TTIP/TAFTA a fait le tour du monde. Des personnalités comme l'ancien ministre des Finances Yánis Varoufákis participent à cette initiative pourtant vouée à l'échec. Explications d'une opération absurde face à des négociations absurdes. L'initiative de Wikileaks est digne d'un film d'espionnage puisqu'elle consiste à financer pour 100 000 €… un "braqueur de dossiers secrets". Il y a quelque chose d'étrange dans cette opération, avec l'appât du gain qui est franchement contestable : pouvoir porter à la connaissance du public des documents traitant d'accords entre gouvernements, tient — normalement — plus d'une mission de service public, que de celle d'un chasseur de primes… rémunéré pour ses talents de voleur. Une fois ce constat effectué sur la méthode, reste le fond de cette affaire : quel est le détail des négociations entre les Etats-Unis et l'Union européenne ? A en croire la Commission, tout serait parfaitement transparent puisque depuis que des pétitions de grande ampleur sont venues pointer du doigt le secret dans lequel le TTIP/TAFTA (aussi nommés Accords de libre échange transatlantique) était négocié, celle-ci a décidé de publier mensuellement l'avancée des discussions. > Lire notre article : L'affolement européen renforce les adversaires du TAFTA Le groupe Wikileaks fait peut-être autre chose qu'un simple appel à la fuite de documents… Pourquoi, en effet, offrir une prime de 100 000 € à celui qui donnerait le contenu de négociations censées être publiées sur Internet mensuellement ? Une vidéo diffusée par Wikileaks explique les motivations de ce financement participatif un peu particulier : Les différents intervenants de cette vidéo appelant à participer au financement de 100 000 € pour dévoiler le traité de libre échange Europe-Etats-Unis, expliquent l'un après l'autre tous les dangers que sa signature pourrait entraîner : santé, alimentation, éducation, agriculture, règles démocratiques… Ce traité, comme les deux autres en cours de négociation (TTP et TISA, voir plus bas), sont, pour ces intervenants, une vaste géostratégie américaine liée à la montée en puissance des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Russie…) ayant pour but d'asseoir une domination planétaire des deux grandes puissances occidentales, les Etats-Unis et l'Europe, par le biais de leurs multinationales.
Des documents sous haute surveillance Le traité TTIP/TAFTA, en tant que tel, dans ses différentes versions modifiées au cours du temps, n'est pas publié. Il est aussi extrêmement difficile à consulter, même pour les députés censés… le négocier. Quant aux documents que la Commission met à disposition du public, ils ne sont en réalité que des synthèses de discussions, des principes généraux. Pas plus. Malgré tout, la Commission européenne continue d'affirmer que les attaques à l'encontre des négociations sur le TTIP/TAFTA sont infondées. Au point d'avoir créé un document intitulé : "Le top 10 des idées reçues sur le TTIP". Ce document permet d'apprendre que les fabricants de crèmes bronzantes de pâtisseries ou de vaisselle européens auraient tout à gagner avec la signature du TTIP… Mais ce ne dit pas la Commission, c'est que le véritable document contenant tous les détails des accords à venir et qui s'élabore depuis 2013, est lui farouchement gardé. Au point que très peu de personnes y ont accès, et surtout — quand elles le peuvent — les conditions de sa consultation sont dignes d'un film d'espionnage. Ce que le conseiller juridique de Wikileaks, Juan Branco, explique en détail, (à l'instar de Julian Assange dans la vidéo plus haut) et qui à son sens, justifie l'initiative de Wikileaks : "Les rares personnes qui ont accès aux documents de la négociation doivent entrer dans une salle sécurisée de l’ambassade américaine où ils sont surveillés en permanence par deux policiers. Ils doivent avoir laissé de côté tous les équipements électroniques qui leur auraient permis de garder des informations et ils n’y ont accès que pendant deux heures : vous imaginez bien que dans ces conditions la négociation ne peut être que déséquilibrée et Wikileaks cherche justement à renverser ce déséquilibre". Faire fuiter le TTIP : aussi absurde que le tenir secret Le financement participatif de 100 000€ pour rémunérer une personne en mesure de fournir le contenu de l'accord du partenariat transatlantique n'est pas crédible en soi : les mesures de protection de ces documents sont d'une telle ampleur qu'il semble impossible que quiconque puisse y parvenir, ou le veuille. L'opération lancée par Wikileaks est en fin de compte absurde, en apparence. Exactement comme le secret autour de l'accord l'est lui aussi, mais en profondeur : comment penser que des députés puissent négocier un accord qu'ils ne peuvent pas consulter dans les détails, et seulement feuilleter durant deux heures, surveillés par des agents de l'ambassade américaine ? Ce qui est par contre marquant dans le financement participatif que Wikileaks vient de lancer, c'est la lumière qui est faite — une nouvelle fois — sur l'opacité de ces négociations.
0 Commentaires
Laisser un réponse. |
InformationsCliquer sur la photographie pour accéder directement au site ayant posté la news Archives
Novembre 2016
Categories
Tous
|